Le chiffre : 2,2
En millions d’euros, le montant de la dépense consacrée au seul aménagement de l’école. Un chantier bouclé en huit mois, qui s’inscrit plus largement dans le cadre de la rénovation du Palais des Congrès pour 3,6 M€. La facture totale de 5,8 M€ est partagée entre l’État, la Collectivité de Corse, la CCI, EDF et la Communauté d’agglomération du Pays ajaccien.
Le projet a mis du temps à mûrir, mais le résultat sera, assurément, à la hauteur de la volonté des décideurs, des concepteurs, des attentes de la jeunesse corse et de la profession.
Le 17 septembre, la CMA et le CCI ont organisé une « journée portes ouvertes » afin que chacun puisse se rendre compte de l’avancement du chantier. Et se faire une idée plus précise du cadre et de l’environnement dans lesquels est aménagée cette École Hôtelière Méditerranéenne, ainsi que des moyens qui seront mis à la disposition des formateurs et de la centaine de ces « apprentis cuisto » de la toute première promotion attendue le 3 novembre pour la rentrée. « C’est le point de démarrage d’une nouvelle aventure voulue par les élus consulaires et le monde de l’entreprise. Cela fait un bon moment que les acteurs économiques espèrent que ce projet se concrétise. On y est. Tous les aspects des métiers de l’hôtellerie et de la restauration seront abordés : la cuisine, la sommellerie, le service, le management… ».
Portée par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Corse, la Chambre régionale de Métiers et de l’Artisanat, le Groupe Amparà Méditerranée – qui en assurera la gestion – et leurs partenaires académiques, connectée aux écoles Savignac et d’Avignon, soutenue et accompagnée par l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) et le Cercle des grandes maisons de Corse, l’Université de Corse, l’AFPA et l’Académie cette école unique, aspire à devenir un pôle d’excellence en Corse et en Méditerranée.
Le Palais des Congrès est un plus dans la formation de ces jeunes qui seront associés à la conception de l’offre événementielle de l’établissement. « Cette interaction leur permettra d’enrichir leur expérience professionnelle et d’acquérir de plus grandes compétences. Tout est regroupé ici avec l’ambition de faire vivre une aventure particulière aux apprentis, de créer des vocations, de favoriser une large adhésion aux métiers de l’hôtellerie et de la restauration avec des formations ouvertes à l’international. »
Des besoins importants en main-d’œuvre qualifiée
Les formations proposées vont du certificat d’aptitude professionnelle au bac +3 : CAP cuisine, CAP service, CAP pâtissier, CS sommellerie, brevet professionnel Arts de la cuisine et du service, bachelor management hôtellerie-restauration. Les élèves sont accueillis à partir de 15 ans après une classe de 3e, et suivent une formation en alternance entre les cours à l’école et des périodes de mise en pratique dans les établissements partenaires de l’institution. Les débouchés sont à la mesure des besoins en main-d’œuvre qualifiée : très importants !
« Pour l’année 2025, les besoins des métiers du tourisme en Corse c’est environ 1 500 jeunes diplômés par effet de renouvellement générationnel. Et à peine 150 jeunes diplômés, tous niveaux confondus, sortent des structures existantes » précise Jean-Baptiste Pieri, secrétaire général du Cercle des grandes maisons de Corse. Un grand écart que l’École hôtelière méditerranéenne – dont la capacité d’accueil peut monter jusqu’à 400 élèves – doit largement contribuer à réduire au fil des sessions…
Après une présentation dans la salle de conférences, le public a visité les installations alors que les ouvriers sont à la tâche et que le mobilier vient d’être livré. Les structures de l’école occupent une surface totale d’environ 1 000 m2 dans lesquels sont réparties neuf salles de classe, cinq chambres froides (avec accès direct par monte-charge) et un plateau technique haut de gamme : cuisine super équipée, plonge, local, bar, et une grande salle de restauration avec ses terrasses sur la mer. Y a plus qu’à !
Marc Goetz, directeur de l’hôtel du Golfe à Ajaccio et président de l’UMIH Corse-du-Sud
« Je suis présent à double titre. D’abord, je vais intervenir comme formateur ; ensuite et surtout, parce que la profession accompagne ce projet. Il est important d’augmenter le nombre de collaborateurs pour couvrir les besoins dans nos différents établissements en Corse, d’avoir des personnes mieux formées, avec un esprit de partage des éléments de la destination. Recevoir une formation sur place permettra de mieux répondre à l’attente des clients, à leur désir pour la connaissance et la découverte du territoire. Que cette école s’installe ici va intuitivement, directement connecter la Corse avec les professions présentées. Il y aura ainsi une acculturation extrêmement forte, détaillée avec des histoires concrètes à raconter, sur le miel, l’élevage, la vinification, etc. Tout cela constitue une valeur ajoutée du territoire corse à l’égard de ces jeunes. Ils entrent dans ce métier avec la possibilité de progresser, et cette école hôtelière peut être un parfait outil pour que la formation soit aussi dispensée ou suivie à différents moments de la vie, y compris dans des projets de reconversion et de reprise d’un établissement. »
Emmanuel Lojou – « La cuisine, c’est lui ! »
Pour parodier une pub, on dira que « la cuisine, c’est lui ! ». À bientôt 50 ans, Emmanuel Lojou a une bonne dose d’un peu de tout ce qui se mijote dans une cuisine, à transmettre, à enseigner, à partager avec ces jeunes, invités pour le coup à consommer ses cours sans modération…
Originaire de Locquémeau, dans les Côtes d’Armor, Lojou apprend le métier à partir de 15 ans. Formateur pendant une décennie à la faculté des métiers de Rennes, chef pâtissier dans un grand restaurant, puis installé à son compte, il atteint une première fois l’excellence en 2007 lorsqu’il remporte, à Toulouse, le titre de « Champion de France des desserts » pour un « praliné yuzu au thé vert ». Arrivé en Corse en 2017, professeur de cuisine chez Amparà, il est intronisé, cet hiver dernier à Deauville, « Maître cuisinier de France ». Autant dire que l’école hôtelière tient là un enseignant de tout « premier choix ».
« La cuisine, c’est lui ! », aussi, parce qu’il en a dessiné les plans, décidé l’agencement, sélectionné le matériel, arrêté son choix sur les meilleurs pianos où les « apprentis cuisto » pourront réciter leurs gammes en attendant d’en tirer les premières notes savoureuses… « On a fait en sorte d’arranger l’espace au mieux, de le rendre le plus fonctionnel et le plus agréable possible, pour que chacun prenne du plaisir, se sente à l’aise, bénéficie des meilleures conditions pour apprendre le métier. Les jeunes réunis en brigade vont pouvoir se répartir, tourner sur les postes : entrées, plats chauds, desserts… » Dans la grande salle de restauration, les convives bénéficient d’une vue panoramique exceptionnelle sur le golfe. D’une vue, aussi, directe sur la cuisine dite « de lancement » grâce à une ouverture spécialement créée. « Comme ça, ils pourront voir les élèves travailler. » À l’évidence, tous les ingrédients sont réunis pour que la mayonnaise prenne…